Pour ce 5eme numéro, les cahiers de la LCD ont souhaité, sous la direction de Marielle Toulze et Anita Meidani, proposer une réflexion sur la santé et les discriminations. Vous trouverez ci-joint le sommaire de ce numéro ainsi que les informations relatives à ce dernier.
Du traitement différentiel à la discrimination raciste dans les pratiques cliniques (Marguerite Cognet)
Capabilités et sans-abrisme (Renaud De Backer)
Trajectoires migratoires et expériences de soin en santé mentale (Daria Rostirolla)
Le nouveau traitement juridique contre l’éloignement du territoire des étrangers malades en France et devant la Cour européenne des droits de l’homme : quelle efficacité ? (Marion Blondel)
Quand les discriminations interrogent les pratiques de professionnel-le-s de santé (Gaëlle Donnard et émilie Jung)
ENTRETIEN
Le GISS | Alter Corpus, Une association engagée auprès des personnes intersexuées (Entretien de Benjamin Moron-Puech et Mila Petkova, réalisé par Arnaud Alessandrin et Johanna Dagorn)
VARIA
Les aménagements raisonnables à la croisée des chemins (Josepha Dirringer)
RECENSIONS
Maïtena Armagnague-Roucher (2016), Une jeunesse turque en France et en Allemagne, Le Bord de l’eau (Par V. Albenga)
Arnaud Alessandrin, Karine Espineira (2015), Sociologie de la transphobie,Maison des sciences de l’homme d’Aquitaine. (par J. Cussac)
E stelle Carde (2016), Discriminations et accès aux soins en Guyane française, Les presses de l’université de Montréal (par F. Guillemaud)
Les acteurs du secteur associatif envisagent fréquemment la question des discriminations comme extérieure à leur univers. En raison de leur vocation éducative, sociale, ou d’animation, et à leur orientation affichée vers l’intérêt général, ces acteurs seraient d’emblée prémunis de toute forme de sélectivité adossée à des critères illégitimes comme le sexe, la religion, l’origine, l’âge, l’orientation sexuelle, le territoire, la langue etc. (Melo (coord), 2012).
Cette distance supposée mérite cependant d’être questionnée. Ce numéro propose de diriger ce questionnement vers l’un des segments – plutôt moins étudié que d’autres alors qu’il est placé en première ligne de ces interrogations : celui des associations d’éducation populaire, opérant pour l’essentiel sur le marché du travail de l’animation socioculturelle et dans le champ des politiques et des actions en direction de la jeunesse (de Lescure, Lebon, 2017).
Education populaire, diversité des jeunesses et « discrimination positive à la Française »
Le champ de l’éducation populaire n’est pas, en effet, « aveugle aux différences » pour une première série de raisons de nature historique : ses acteurs se sont tous, historiquement, positionné par rapport à la traditionnelle question de l’unité ou de la diversité de la jeunesse (n’est-elle qu’un « mot » ? Bourdieu, 1980), mais de surcroit, l’animation socioculturelle, qui en représente la version professionnalisée, s’est d’emblée développée en référence au segment urbain et racisé de cette jeunesse, celle des quartiers « dit sensibles ». C’est également un secteur où l’on retrouve massivement employés les étudiant·e·s (Pinto, 2014).
Le développement des mouvements d’éducation populaire dès le début du 20ième siècle (Christen, Besse, 2017) est en effet traversé par la question de la division de la société en classes. Une part d’entre eux opte pour une prise en charge ciblée de jeunes définis par leur condition sociale. L’Action Catholique de la Jeunesse Française, crée en 1886, se spécialise par milieux sociaux (JOC, JAC etc.), et la constellation d’organisations de jeunesse satellites du PCF s’organise en autant d’organes de socialisation politique destinés à former les futurs militants acquis à la cause de la « lutte prolétarienne » (Augustin & Gillet 2000).
L’approche « universaliste » ciblant une classe d’âge dans sa globalité remonte également aux sources l’éducation populaire. En France, l’inspiration républicaine commune à l’instruction publique et au développement d’un mouvement comme la Ligue de l’Enseignement dès 1881 conduit à viser l’édification d’un citoyen abstrait, défini par sa seule appartenance à la Nation. Comme dans le scoutisme de Baden Powell en Grande Bretagne, la référence à un espace commun – national ou mondial – auquel les jeunes sont appelés à participer, fonde alors la revendication d’une action située par-delà les clivages de la société et des particularismes. Il s’agit d’édifier le genre de citoyen que requièrent l’organisation et la cohésion sociales (Coussée & Jeffs 2012).
Peu ou prou cette alternative et cette tension entre deux approches de la « diversité » des jeunesses, n’ont jamais cessées de traverser les acteurs de jeunesses (Coussée & Jeffs 2012). Lorsque ceux-ci se professionnalisent et s’institutionnalisent sous la houlette de l’Etat planificateur des années 60, c’est pour soutenir le développement d’une vie sociale qui peine à s’organiser dans les « grands ensembles » nouvellement bâtis (Augustin, Gillet 2000). Ce faisant, tout en participant d’une politique « universaliste » de cohésion nationale, ils s’inscrivent dans une « discrimination positive à la Française » (Doytcheva, 2007), c’est-à-dire une pratique de ciblage d’un public particulier à partir de critères – en l’occurrence « le territoire » – qui le désignent sans le nommer.
Projets et pratiques aux prises avec la « différence »
L’ambition de ce numéro est de scruter les manifestations et les effets de ces tensions et dilemmes, dans les références, l’organisation et les pratiques de la vaste constellation d’acteurs qui, aujourd’hui, se revendique de l’éducation populaire ou en « partage les présupposés » (de Lescure, Porte, 2017). Il s’agit de cerner comment, dans une société où une gamme étendue de différences (de condition sociale, de genre, d’âge, d’orientation sexuelle etc.) sert désormais de référence aux identités individuelles et collectives, choisies ou subies (Wievorka, 2001), ces acteurs prennent en charge cette diversité ainsi que le spectre des discriminations qui l’accompagne.
Les propositions attendues se situeront dans le cadre de cette interrogation, et pourront plus particulièrement s’articuler avec un ou plusieurs des axes suivants.
Sélectivité du marché de l’emploi associatif dans le champ de l’éducation populaire
Le champ de l’éducation populaire recoupe pour une large part celui de l’intervention sociale, et son développement accompagne l’évolution des métiers du travail social durant les dernières décennies. Ceux-ci connaissent une double évolution : une dualisation, avec, d’un côté, le maintien de métiers centraux historiquement construits comme des « professions », associant conventions collectives, formations spécialisées, statuts, grilles de qualifications etc., et invention continue de « nouveaux métiers » de l’autre, davantage adossés à une logique de compétence, à une plus forte indétermination statutaire et, pour un part d’entre eux, à une précarisation importante (Chopart, 2000). C’est à cette dernière catégorie qu’appartient l’essentiel des emplois dans le secteur de l’animation (Lebon 2009), phénomène que l’on observe plus largement dans le secteur de l’emploi associatif (Hély, 2005).
La tendance à la « personnalisation » des compétences dans les métiers en relation avec le public semble par ailleurs transversale, n’épargnant pas non plus les emplois les mieux protégés et les plus qualifiés et l’importance prise par la mobilisation compétences biographiques ou « personnelles » dans ce type de fonction constitue la deuxième évolution majeur (Dubet, 2002).
Ces deux évolutions posent la question des formes de sélectivité dans l’emploi dans les milieux de l’éducation populaire dans les termes de l’alternative présentées dans cet appel : faut-il recruter selon des critères « universalistes » ou bien les professionnels doivent-ils être à l’image des « publics » ?
Cette question a déjà été partiellement documentée dans les cas des animateurs « de quartiers », souvent recruté pour leur proximité supposée, en termes d’âge, de territoire et d’origine ethnique, avec leurs publics (Boucher 2005). Les logiques qui président à ces recrutements sont cependant mal connues : s’agit-il simplement, dans l’esprit des recruteurs associatifs ou municipaux, de faire jouer à ces jeunes une fonction de contrôle social vis-à-vis de leurs pairs, ou bien ces logiques de sélectivité sont-elles plus complexes, itératives, ambivalentes dans leurs visées et hétérogènes dans leurs résultats, comme d’autres espaces de recrutement (Cortesero et al. 2013).
Cette question de formes de sélection et des logiques de sélectivité mérite également d’être étendue à d’autres critères que la « race ». Le genre ou l’orientation sexuelles, par exemple, interviennent-ils et selon quelles modalités ? Le domaine d’intervention et la nature des publics constituent-ils une variable clé ? L’âge mérite également d’être interrogé lorsque qu’on sait qu’historiquement, les mouvements de jeunesse furent rarement dirigés ou représentés par des moins de 30 ans (Tétard, 2007).
Associations d’éducation populaire et politiques de lutte contre les discriminations
Le champ de l’éducation populaire est aussi acteur des luttes contre les discriminations. Une étude récente révèle par exemple que dans plus de 9 actions sur 10 financées par le conseil régional d’Île de France entre 2008 et 2012, le porteur du projet était une association (L’Horty 2013).
Une meilleure connaissance de la nature de cette contribution s’impose donc. Comment les acteurs de l’éducation populaire se saisissent-ils des possibilités offertes par l’action publique antidiscriminatoire au travers de ses programmes de financement, pour développer des actions dans les champs de la lutte contre les discriminations ? Comment appréhendent-ils et conçoivent-ils ces actions ?
On pourrait par exemple (sans que cette piste soit exclusive) poser la question de leur positionnement au regard de la dimension politique de la lutte antidiscriminatoire. Ambitionnent-ils de réaliser un travail de « conscientisation » des jeunes, de leur offrir les outils d’une meilleure compréhension des mécanismes de pouvoir et d’éviction dont ils sont l’objet, à l’instar des pratiques d’empowerment de jeunesse observées outre atlantique (Talpin…). A contrario, participent-ils de la logique de dépolitisation à l’œuvre sur le temps long dans les programmes d’actions publics, en subsumant la question des discriminations dans des thématiques renvoyant aux individus et à leur mobilisation, comme la diversité ou l’insertion (Doytcheva 2015). De façon générale, il conviendrait ici de se demander quelles entrées sont privilégiées par ces acteurs (intégration ? laïcité ? diversité ? accès aux droits ? etc.), pour quelles raisons, et avec quelles conséquences quant à la façon de concevoir et mener des projets dans le champ de la lutte antidiscriminatoire. La même question pourrait être posée quant à la sélection des critères jugés pertinents pour construire des projets d’action (genre, âge, origine, territoire, etc.). Comment une hiérarchie des critères prioritaires prend-elle forme, et au terme de quels processus ?
Vice et vertu de la mixité : la question des publics
La tension entre ciblage et universalité a enfin conduit, dans les années récentes, à la multiplication de travaux étudiant les mécanismes de filtrages des publics dans l’accès aux dispositifs et l’offre proposée par l’éducation populaire. Mais on peut s’interroger aussi sur la question des lieux et des espaces de la mixité. L’éducation populaire a historiquement beaucoup investie “les lieux” comme espace de la mixité (Besse, à paraître) et invite à se questionner sur le “remplissage” et l’animation de ces lieux.
La sélection par l’argent a ainsi été constatée dans le cas des colonies de vacances, dont les évolutions récentes démontrent un recul de la mixité sociale et raciale (Leroy, 2017). Des logiques d’exclusion des publics féminins ont également été mises à jour dans le cas de l’offre de loisirs organisés, dont l’analyse révèle qu’elle est elle-même fortement genrée (Bacou, Raibaud, 2011). Le même constat pourrait sans doute être proposé dans le cas des offres de loisir localisées dans les quartiers populaires, et attirant de fait, pour l’essentiel, un public ethnicisé (Masclet, 2003).
Ces travaux montrent aussi, au-delà des effets d’éviction, comment la faible mixité tend à constituer ces espaces comme des lieux de construction et la consolidation des identités autour desquels les jeunes se retrouvent. Les stéréotypes genrés à partir desquels les activités de loisir sont conçues et gérées permettent aux adolescents de les mobiliser comme des lieux d’affirmation de leur virilité (Guérandel 2011). Les interactions entre les animateurs « issus des quartiers » et de leurs publics racisés suscitent parfois des « positionnements en miroir », pouvant, par exemple, favoriser, par un jeu de reconnaissance réciproque, l’appropriation d’une identité « musulmane » (Kerivel, 2014)…
Les propositions d’articles pourront s’inscrire dans le prolongement de ces travaux, et viser à en consolider ou en discuter les constats. Elles pourront également essayer de les étendre à d’autres espaces et d’autres critères, par exemple l’orientation sexuelle. Elles pourront également s’intéresser à la façon dont ces questions sont pensées et prises en charge par les organisations concernées. Historiquement en effet, ces organisations ont assumé divers partis pris face à la diversité de leurs publics, en se concentrant, par exemple sur les jeunes issus des milieux ouvriers dans une perspective de promotion et d’émancipation d’une classe sociale. Dans les cas de figure évoqués ici, aucun « choix » ne semble explicitement gouverner à la construction d’un public genré ou ethnicisé. Comment, par conséquent, cette construction est perçue, traitée, accompagnée ou combattu par les directions et les acteurs de ces structures ?
Les propositions pourront également prendre le contrepied des travaux cités, qui ont en commun de traiter la faible mixité comme un « manque », comme un « défaut » à corriger. Cette relative homogénéité des publics ne peut-elle pas, dans certain cas, constituer une ressource (Duru Bellat, Marin, 2010), par exemple sur d’autres plans de la construction de l’identité ? Ne permet-elle pas à des jeunes identifiés par leur appartenance à une minorité, de trouver dans cet entre soi le support d’une réappropriation positive de leur identité, que le stigmate vécu à l’extérieur fragilise (Goffman, 1975) ? N’offre-t-elle pas la protection des « contre-publics subalternes » (Fraser, 2005) qui permettent à ceux dont la parole est confisquée par les mécanismes de la domination symbolique de retrouver, par l’échange entre pairs, les mots pour maitriser leur expérience et élaborer une vision partagée, plus directement sociale et politique, de leur condition ?
BIBLIOGRAPHIE
Augustin A., Gillet J.C. (2000), l’Harmattan, Paris
Bacou M., Raibaud Y. (dir.), 2011 « Mixité dans les activités de loisir. La question du genre dans le champ de l’animation », Agora Débats / Jeunesse, n°59, 2011
Boucher M. (2005), « La question ethnique, l’intervention sociale et la laïcité. Les enjeux des discriminations raciales dans le travail social », Connexions, vol. no 83, no. 1, pp. 99-114
Bourdieu P. (1980)., « La jeunesse n’est qu’un mot », in Questions de sociologie, Minuit, Paris, 1980, pp. 143-154
Chopart J.N.(2000), Les mutations du travail social. Dynamique d’un champ professionnel, Dunod, Paris, 2000
Christen C., Besse L. (dir. 2017), Histoire de l’éducation populaire 1815-1945. Perspectives françaises et internationales, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Histoire et Civilisations », Villeneuve d’Ascq
Cortesero, R., Kerbourc’h, S., Mélo, D., & Poli, A. (2013), « Recruteurs sous tensions. Discrimination et diversité au prisme de registres argumentaires enchevêtrés » Sociologie du travail, 55(4), 431-453.
Jeffs, T. & Coussee, F. (2012), « Informal Education in a Historical Perspective: Between an instrument of social education and a socio-educational practice », in Loncle, P., Cuconato,M., Muniglia V. & Walther A. « Youth Participation in Europe », Policy Press.
de Lescure E., Lebon F., (dir). 2017, L’éducation populaire au tournant du 21e siècle, Les éditions du croquant, Vulaine sur Seine
de Lescure E., Porte E., (coord) 2017, « Éducation populaire : politisation et pratiques d’émancipation », Agora débats/jeunesses, , no.2 volume° 76
Doytcheva M. (2007), Une discrimination positive à la française ? Ethnicité et territoire dans les politiques de la ville, la Découverte, Paris
Doytcheva M. (2015), Politiques de la diversité. Sociologie des discriminations et des politiques antidiscriminatoires au travail, PIE Peter Lang, coll. « Travail & Société », Bruxelles
Dubet F. (2002), Le déclin de l’institution, Éd. du Seuil, coll. L’épreuve des faits, Paris
Duru-Bellat M et Marin B., 2010, « La mixité scolaire, une thématique (encore) d’actualité ? », Revue française de pédagogie, 171, p.5-8
Fraser N. (2005), Qu’est-ce que la justice sociale ? Reconnaissance et redistribution, La Découverte, Paris
Goffman E. (1975 [1963]), Stigmate. Les usages sociaux du handicap, Les Éditions de Minuit, Paris,
Guérandel, C. (2011), « Sports, genre et jeunesse populaire : le rôle central des professionnels. » Agora débats/jeunesses, 59,(3), p. 93-106
Hély M. (2009), Les métamorphoses du monde associatif, Presses universitaires de France, coll. « le lien social », Paris
Leroy C. (2017), « Colonies de vacances, la fion de l’âge d’or », Sciences humaines, no 293, Juin
L’Horty Y. (2013), « Anatomie d’une politique régionale de lutte contre les discriminations », TEPP, Rapport de recherche, no. 2013-01
Masclet O. (2003), La gauche et les cités. Enquête sur un rendez-vous manqué, Éd. La Dispute, coll. Pratiques politiques, Paris Melo D. (coord), (2012) « Manières de recruter : l’égalité des chances à l’épreuve de l’expérience des recruteurs », Convention DARES, APR « Pratiques de recrutement et sélectivité sur le marché du travail »,
Pinto V. (2014), À l’école du salariat. Les étudiants et leurs “petits boulots”, PUF, collection « Le Lien social »,Paris .
Talpin J. (2016), Community organizing. De l’émeute à l’alliance des classes populaires aux Etats-Unis, Raisons d’agir, coll. « Cours et travaux », Paris
Tétard, F. (2007), « Vous avez dit éducation populaire ? Itinéraire chronologique », Agora Débats/Jeunesse, no 40
Wieviorka M. (2001), La différence, Les Éditions Balland, Paris
Les propositions sont à adresser au plus tard le 08/12/2017 à
Une présentation de(s) auteur.e.s -2,3 publications et affiliations
Un résumé en français d’une à deux pages
Une bibliographie indicative
CALENDRIER
retour aux auteurs : 15/12/201è
remise des articles selectionnés : 27/04
mise en forme des articles et derniers retours aux auteurs : mai-Juin 2017
remise des articles au comité de rédaction / rédaction en chef : FIN AOUT 2018
publication : FIN OCTOBRE 2018
Les propositions finales devront comprendre :
L’article complet (30.000 environ)
Une présentation de(s) auteur.e.s -2,3 publications et affiliations
Un résumé en français (10lignes)
Privilégier des articles avec 2 niveaux de titre maximum.
NORMES DE REDACTION :
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Pour les livres : Nom Initiale du prénom. (date), Titre du livre, édition, collection, date.
Pour les articles : Nom Initiale du prénom. (date), « Titre de l’article », Nom de la revue, numéro, volume, pagination (ex : pp. 10-20).
Pour un chapitre de livre : Nom Initiale du prénom. (date), « Titre de l’article », in Titre du livre (Nom de / de la dir., Initiale du prénom, dir.), éditeur, coll., pagination (ex : pp. 10-20).
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Les articles feront l’objet d’une double expertise par les membres de comité scientifique
Pour ce septième appel à articles, la revue « Les cahiers de la LCD » (Lutte Contre les Discriminations)[1] a décidé de s’intéresser aux langues, sous l’angle des « discriminations linguistiques ». Sujet d’actualité depuis un an : la loi de modernisation de la justice de novembre 2016 a opéré un changement sur l’article 225 du Code Pénal. Si la plupart des textes juridiques internationaux interdisent depuis plusieurs années les discriminations basées sur des critères linguistiques (au même titre que toutes les autres discriminations), la loi française s’est donc saisie tardivement de cette question.Il est désormais interdit de discriminer un individu sur la base de critères linguistiques. Pour la première fois en France, il est en effet établi comme discriminatoire «toute distinction entre les personnes morales sur le fondement […] de la capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français»; à savoir la langue étrangère et/ou langue régionale.
Dans ce contexte médiatique et juridique, quels sont les enjeux et les conséquences, tant individuels que collectifs d’une telle reconnaissance (C. Taylor, 2004) dans les champs scolaires, juridiques ou bien encore celui de l’emploi? La variété et la diversité des langues en un même espace civique, légal, scolaire, politique, social est-elle un obstacle ou un fondement nécessaire à son identité ? Les langues sont-elles discriminées en tant que langues (et selon quelle raison politique, scientifique, idéologique ?), ou bien sont-ce les locuteurs de ces langues qui sont discriminés (et pour quelles raisons) ?
Qu’il s’agisse de la péjoration des langues et accents régionaux – on pense pour la France à Pierre Bourdieu qui cachait son accent béarnais en arrivant à Paris, à Jacques Derrida qui se mit à détester la poésie de René Char quand il l’eût entendue prononcée par son auteur, et bien sûr à la longue histoire des textes scolaires qui effacent de la réalité des enseignements et des transmissions de savoir la réalité des langues des élèves -, de la maitrise ou de la non-maitrise de langues étrangères, de la stigmatisation de langues ou de codes maitrisés ou de celles/ceux qui les portent (accents « provinciaux » et de la « France d’outre-mer », jeunes allophones, jeunes issus de quartiers populaires et/ou des banlieues etc.), la question des discriminations selon le langage est ici posée. Quels sont ses rapports avec les idéologies linguistiques et avec les représentations sociales (la norme – la langue « sans accent » – fut longtemps opposée aux marges géographiques – les provinces, les colonies – ; elle peut l’être aujourd’hui sur d’autres marges d’une autre géographie mentale : les banlieues, les jeunes, les immigrés) ? Comment et pourquoi ces représentations évoluent-elles ?
Cette discrimination linguistique s’appuie donc non seulement sur des façons de parler une langue mais aussi sur le fait de parler d’autres languesque la langue attendue, imposée, survalorisée–et d’une certaine façon, d’être bilingue ou plurilingue, quand la norme serait de pratiquer une et une seule langue normée, qui est celle des pouvoirs. Mais ce modèle national strict (monolinguisme d’une langue hypernormée, modèle longtemps transmis par l’École) est-il de nos jours encore d’actualité ? A quoi sont dus les changements menant à une reconnaissance de la diversité, de la variété et en quoi ces changements peuvent-ils impliquer des bouleversements dans les représentations et les pratiques, et plus précisément dans le cadre scolaire, des renouvellements d’ordre cognitif ?
Si l’on raisonne de façon comparative, il sera intéressant d’interroger ce qui a freiné ou encouragé l’éclosion du critère de « discrimination linguistique » et récemment encore du terme de « glottophobie » (Blanchet 2016) dans les textes juridiques nationaux comme internationaux. Dans une même perspective, nous questionnerons le rôle des associations, et des mouvements sociaux qui portent ces revendications, à la fois locales et transnationales. Aussi, il sera attendu de questionner les limites mêmes des termes de la loi : que recouvre-t-elle, qui oublie-t-elle ? (Potriquet, Huck et Truchot, 2016)
Si l’on raisonne en termes de privilèges et de stigmates, il sera tout aussi pertinent de se pencher sur ce que sont les effets d’un langage non attendu sur les personnes en parcours scolaire et recherchant un emploi par exemple. Dans le cadre scolaire : le passage du concept (et des pratiques ?) d’intégration à inclusion a-t-il une réalité autre que rhétorique ? Sans limiter les contextes, les discriminations linguistiques pourront tout aussi bien toucher les espaces de santé, les espaces carcéraux ou ceux de l’animation…
Enfin, si l’on raisonne en termes intersectionnels, le présent numéro portera également une attention sur ce qui lie ou différencie les discriminations linguistico-culturelles et discriminations sociales, les discriminations liées au langage et leurs répercussions sur les différentes populations concernées (qu’il s’agisse de comparer les catégories d’âge, de sexe, les catégories professionnelles, les répartitions géographiques dans le paysage urbain ou national, en divisions entre centre/s et périphérie/s).
Par ailleurs, si la langue rassemble et unit (permet la communication, l’intercompréhension mutuelle, l’identification d’une communauté, d’une nation, d’un groupe social, etc.) le propre de la langue n’est-il pas aussi de discriminer au sens d’identifier à part, de séparer – Saussure parle de « deux forces [qui] agissent sans cesse simultanément et en sens contraire » que sont « l’esprit particulariste » et la « force d’intercourse » ? En ce sens, toute discrimination n’est-elle que nocive, négative, stigmatisante ou n’est-elle pas de fait un élément de l’identité (du fait d’appartenir à du même) ? Aussi, en quoi une réappropriation du sens et des enjeux des langues ne pourrait-elle pas réaménager un ordre politique dans nos sociétés : vivre et faire ensemble tout en étant aussi distincts ?
Reférences
Philippe Blanchet, Discriminations : combattre la glottophobie, Textuel, 2016.
Daniel Coste (sous la direction de), Les langues au cœur de l’éducation. Principes, pratiques, propositions. EME, 2013.
Tullio De Mauro et Andrea Camilleri, La langue bat où la dent fait mal, Lambert-Lucas, 2017.
Jean-Marie Klinkenberg, La langue et le citoyen, PUF, 2001.
Jean-William Lapierre, Le pouvoir politique et les langues, PUF, 1988.
Ghislain Potriquet, Dominique Huck, Claude Truchot, « Droits linguistiques » et « droit à la langue ». Identification d’un objet d’étude et construction d’une approche. Actes du colloque international de Strasbourg 25-26 septembre 2014, Lambert-Lucas, 2016.
Style des propositions à contributions attendus :
Les propositions d’articles sont attendues avant le 23 février 2016.
Les propositions devront comprendre :
L’article complet (30.000 environ)
Une présentation de(s) auteur.e.s -2,3 publications et affiliations
Un résumé en français (10lignes)
Les normes de mise en page sont disponibles à l’adresse suivante : http://www.lescahiersdelalcd.com/appel-a-articles/appel-a-articles-permanent/
Dates limites d’envoi et conditions :
L’ensemble des articles soumis à expertise devront-être envoyés à l’adresse suivante avant le 23 février 2018 : cahiers.cd@gmail.com
Les articles feront l’objet d’une double expertise
Les auteur.e.s seront informé.e.s de la recevabilité de leur proposition, ou de la correction et types de corrections le 23 mars.
Les articles retenus devront être envoyés modifiés, avant le 23 avril 2018.
La publication de ce numéro sur « Langues et discriminations » est prévue en juin 2017.
Les cahiers de la LCD sont une « nouvelle » revue dans le paysage universitaire français. Ils visent à rassembler les connaissances et enrichir la réflexion et l’action autour des questions liées à la lutte contre les discriminations. Ainsi formulés, les cahiers ne sont pas uniquement une revue « qui traite » des discriminations mais également une revue « qui lutte » contre ces dernières à travers les propositions des chercheuses et chercheurs, mais aussi des acteurs et actrices de la lutte contre les discriminations. A destination des universitaires et étudiant.e.s comme des professionnel.le.s du champ des discriminations, les cahiers de la LCD encouragent des propositions d’articles et de thématiques variés, à l’interface des compétences académiques et professionnelles.
Depuis 2018, la revue est disponible sur Cairn à cette adresse : Cahiers de la LCD